Une collaboration essentielle face aux enjeux mondiaux du numérique
Du 9 au 10 octobre 2025, le réseau Fratel a tenu sa 23e réunion annuelle à Luxembourg, accueillie par l'Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR) et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) France. Sous le thème Grands acteurs internationaux du numérique: quels impacts au niveau local?, près de 140 participants représentant 23 autorités de régulation, des institutions internationales et des acteurs du secteur se sont réunis pour débattre des défis de régulation numérique à l'ère de la domination des géants du numérique.
Le Luxembourg a saisi cette occasion pour réaffirmer son engagement en faveur d'une régulation collaborative, d'une souveraineté numérique renforcée et d'une innovation technologique centrée sur l'humain. Le pays partage sa stratégie à l'horizon 2030, fondée sur l'intelligence artificielle, les technologies quantiques et la gouvernance des données. Des priorités qui résonnent avec les enjeux discutés lors de cette réunion.
Aujourd'hui, plus de 5 milliards de personnes sont connectées à internet, mais cette connectivité mondiale est façonnée par un nombre limité de puissants acteurs numériques. En Afrique subsaharienne, où la croissance numérique reste rapide avec 200 millions de nouveaux utilisateurs d'internet mobile attendus d'ici 2030, les régulateurs font face à des défis sans précédent : assurer une concurrence équitable, protéger la souveraineté des données et garantir que cette transformation numérique bénéficie à tous. C'est pourquoi des collaborations comme celle du réseau Fratel sont vitales pour harmoniser les approches réglementaires et renforcer la capacité des régulateurs à naviguer dans un écosystème numérique de plus en plus complexe.
Des discussions qui redéfinissent la régulation numérique
La réunion annuelle de Fratel s'est déroulée autour de trois axes majeurs, reflétant les enjeux critiques du moment.
La régulation des services numériques: bâtir une coopération internationale
La première table ronde, présidée par Dahirou Thiam (Directeur général de l'ARTP au Sénégal), a examiné comment les régulateurs peuvent collaborer face aux géants du numérique comme Amazon, Apple, et Meta, dont l'influence transcende les frontières. Plutôt que de subir cette réalité, les participants ont exploré comment renforcer la coopération internationale pour garantir l'équité du marché, la protection des consommateurs et l'émergence de services alternatifs innovants.
Les échanges ont mis en avant une vision partagée : une régulation collaborative fondée sur l'harmonisation des approches et les partenariats transnationaux. Comme l'a souligné Gil Moureaux (ARCOM France), secrétariat exécutif du réseau REFRAM, lorsque les régulateurs coordonnent leurs efforts, ils peuvent efficacement façonner un écosystème numérique plus équitable et compétitif. Des régulations harmonisées à l'image de ce qui se développe en Europe démontrent qu'une action collective est non seulement possible mais transformatrice.
L'intelligence artificielle: créer des opportunités équitables pour tous
La deuxième table ronde, dirigée par Marc Sakala (Directeur général de l'ARPCE de la République du Congo), a porté sur le développement inclusif des services d'intelligence artificielle. Les IA génératives offrent des opportunités remarquables: accessibilité accrue, innovation technologique, résolution de problèmes complexes. Pour que ces bénéfices se concrétisent pour tous, les régulateurs doivent garantir une concurrence loyale et l'accès équitable aux ressources critiques: puissance de calcul, données, services cloud.
Les intervenants ont présenté des solutions concrètes: régulations supranationales, partenariats stratégiques et gouvernance collaborative pour assurer que le développement de l'IA profite à l'ensemble de l'écosystème citoyens, entrepreneurs, startups, et non seulement aux quelques géants du secteur. La vision partagée est celle d'une IA générative qui ouvre davantage de portes plutôt qu'elle ne les ferme, et qui renforce l'accès équitable à internet et à l'information.
Un numérique soutenable pour les générations futures
La troisième table ronde, présidée par Patricia Amand (Membre du Conseil de l'ARTCI de Côte d'Ivoire), a abordé comment construire un numérique durable. Bien que le secteur offre des solutions innovantes pour la transition climatique, les participants ont reconnu qu'une action volontaire est nécessaire pour réduire l'impact environnemental croissant du numérique: consommation énergétique, épuisement des ressources, gestion des déchets électroniques.
Les échanges ont mis en lumière des solutions concrètes : les régulateurs et les acteurs publics disposent de leviers efficaces pour exiger et accompagner les fournisseurs de services et d'infrastructures vers une réduction progressive de leur empreinte environnementale. Cette approche collaborative garantit une durabilité des services pour les générations futures tout en préservant les ressources des pays, en particulier ceux dont les ressources énergétiques et en eau sont limitées. La vision partagée est celle d'un numérique qui construit plutôt qu'il ne détruit.
Pertinence pour les régulateurs africains et la communauté iPRIS
Ces discussions résonnent fortement au sein de la communauté iPRIS et du réseau des autorités nationales et régionales de régulation africaines, en particulier en Afrique francophone.
Les défis soulevés à Luxembourg tel que régulation des plateformes numériques, gouvernance de l'IA, durabilité des infrastructures, sont des enjeux directs pour les régulateurs africains. Ils font face à une dépendance croissante vis-à-vis de quelques acteurs mondiaux tout en tentant de bâtir des écosystèmes numériques inclusifs et résilients. La question de la souveraineté des données, la protection des consommateurs et l'équité d'accès aux opportunités numériques sont des priorités centrales.
iPRIS facilite précisément ce dialogue critique. Le programme rassemble les autorités nationales de régulation et les organisations sous-régionales de régulation d'Afrique francophone, et s'inscrit dans un réseau plus large incluant les régulateurs anglophones et lusophones, pour qu'ils s'engagent dans des échanges d'apprentissage entre pairs sur ces enjeux mondiaux. Les sessions de formation, les phases de suivi et les discussions thématiques d'iPRIS permettent à ces régulateurs de traduire les perspectives globales en stratégies d'action locales, adaptées aux réalités et aux capacités de leurs pays.
En participant à des réseaux comme Fratel, les régulateurs africains témoignent de leur engagement envers une régulation numérique responsable et harmonisée. Simultanément, iPRIS renforce leurs capacités institutionnelles pour mettre en œuvre ces apprentissages, garantissant que les régulateurs africains ne sont pas simplement observateurs des tendances mondiales, mais acteurs clés dans la définition du futur numérique du continent.
Regard vers l'avant: les prochaines étapes de Fratel et iPRIS
Les prochaines réunions de Fratel porteront sur des thèmes tout aussi critiques : le déploiement d'infrastructures, le partage d'infrastructure et la qualité de service des nouveaux réseaux de télécommunications. Le prochain séminaire aura lieu en République Démocratique du Congo au cours du premier semestre 2026, tandis que la réunion annuelle de 2026 se tiendra en République de Guinée.
Pour la communauté iPRIS, ces mouvements du réseau Fratel offrent des occasions d'apprentissage continu. Le programme s'engage à maintenir les régulateurs africains informés des développements réglementaires mondiaux tout en les aidant à construire les compétences institutionnelles nécessaires pour naviguer dans ce paysage en mutation rapide.
Rester connecté aux dialogues internationaux comme celui de la 23e réunion annuelle du Fratel n'est pas un luxe, c'est une nécessité stratégique. Les régulateurs africains, qu'ils soient membres de Fratel ou au-delà, doivent comprendre comment les décisions des géants numériques mondiaux façonnent les marchés locaux et adapter leur approche réglementaire en conséquence.
Découvrez comment iPRIS traduit ces insights mondiaux en apprentissages tangibles pour les régulateurs africains. Pour en savoir plus sur le premier cycle francophone d'iPRIS à Luxembourg et sur la manière dont le programme renforce les capacités des régulateurs de télécommunications africains, consultez notre reportage précédent:
iPRIS suscite le changement avec le premier cycle iPRIS pour l'Afrique francophone